Critique: Elephant Man
Londres, 1884. Dans une foire, le docteur Frederick Treves est intrigué par une attraction nommée Elephant Man, il y découvre un homme, John Merrick, totalement défiguré et difforme présenté et traité comme un monstre par son maître. Il le rachete à ce dernier et décide de le prendre en main pour laider médicalement et le réinsérer dans la société. Durant ces cours, il découvre un homme intelligent et très sensible
Chef duvre pour certains, uvre trop classique pour dautres surtout quand ils la comparent aux films de Lynch, Elephant Man sest tout de même instauré comme un grand film grâce à sa sublime photo, ses performances dacteurs exceptionnelles et sa cruauté.
Tout dabord, la distribution du film est portée par un duo dacteurs au sommet de leur art constitué de John Hurt totalement transformé en John Merrick (Midnight Express, Alien Le Huitième Passager), et le génial, peu connu à lépoque, Anthony Hopkins (plus tard Le Silence Des Agneaux, le Dracula de Coppola ). Le premier jongle parfaitement avec les émotions qui ne laissent pas indifférent, et ses problèmes de dictions sont très convaincants. Les passages où ils travaillent la diction et la tenue et ceux où il est coursé par les habitants sont des scènes danthologie grâce à linterprétation de Hurt tout dans lémotion et la justesse. Anthony Hopkins est lui aussi excellent, tout dans la sobriété et lambigüité. Sa situation est étroite, il doit croire en ce quil fait et quil le fait pour de bonnes raisons. Au début, il présente Merrick à ses confrères puis il décide plutôt de laider. La reconnaissance des ses paires est aussi une des raisons de faire des tests sur Merrick, plus tard il oubliera cette gloire. Il est totalement à lopposé de son rôle le plus célèbre de celui dHannibal Lecter où il était dans lexagération (mais une bonne exagération) alors que dans Elephant Man il joue simplement dans la nuance.
A côté de ces rôles écrasants, Freddie Jones et Michael Elphick jouent parfaitement les salauds profiteurs et symbolisent la société londonienne que présente Lynch. On retiendra par ailleurs le rôle tendre et ambigu de Anne Bancroft en actrice qui au départ veut profiter de Merrick et qui se rétracte par la suite. Une excellente distribution en résumé.
Le producteur Mel Brooks, connu pour ses comédies comme lhilarant Frankenstein Junior, fut imprèssioné par le style de réalisation de David Lynch dans son premier film Eraserhead. Le certains classicisme ou académisme du film présenté par des critiques vient de la réalisation de Lynch, le côté original et les mouvements de caméra dErasehead ont disparu pour une image en noir et blanc sublime, des mouvements caméra sont conventionnels et un style de narration linéaire. Mais le but de Lynch nest pas de faire un film audacieux comme pour prendre lexemple ultime de 2001 LOdyssée de LEspace, cest de baser la réalisation sur lémotion et lexcellente gestion des acteurs. Le noir et blanc vient du fait que le maquillage de lElephant Man nétait pas crédible en couleur. La scène douverture peut paraître alors en opposition avec le film avec le portrait de la femme est superposé à léléphant avec la superbe musique et ses percussions. Le reste du film laisse la place à lémotion et lévolution du personnage de John Merrick. Sans en faire un rajout, Lynch nous fait émouvoir de la situation de ce monstre au grand cur et de son sort final. Tous les autres personnages servent à présenter les différents aspects de la société, nous avons les profiteurs (le propriétaire, le gardien, lartiste ), les effrayés (Mrs Treves ) et le reste de la ville qui se moque du monstre. On a une évolution de la perception du Elephant Man, au début un monstre, puis un objet scientifique, puis un humain jusquà sa mort émouvante où il pense quil est accepté pour ce quil est et donc quil se couche sur le dos ce qui le tue car le poids de sa tête létouffe. Tout au long du film, Lynch nous montre aussi la cruauté de la société car même si Treves libére, tout de même, Merrick de la foire, il le met tout de même en avant lors de la conférence. Lactrice et le gardien en profitent aussi et cest là que Lynch pose une ambigüité sur la société. Lynch utilise parfaitement le dicton « on ne doit pas se fier aux apparences ». Dans son film, Lynch prend les opposés, les humains sont la cruauté et le monstre la gentillesse.
Le scénario est inspiré de la vie de Joseph Merrick et des livres de Frederick Treves. Cest un des seuls films de Lynch dont le scénario nest pas été totalement écrit par ce dernier.
A noter aussi la magnifique et hypnotique musique composée par John Morris et comportant le célèbre Adagio pour cordes de Samuel Barber.
Chef duvre magnifique que jadore voir et revoir, il ma principalement marqué par son humanisme, son actualité et la performance exceptionnelle de John Hurt et Anthony Hopkins. Un classique.